Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Démesure et pérégrinations

7 octobre 2012

Projet: amener épistémologie, histoire des sciences et méthodes d'apprentissage à l'université

Introduction et contexte

Dans le cadre de mon stage de L3 je souhaite proposer à l’Institut de la Communication un projet autour des cours de Méthodologie obligatoire en première année de Licence.

Au cours de ma formation à l’université j’ai noté plusieurs lacunes dans l’enseignement supérieur.

Je déplore notamment le manque de préparation intellectuelle des étudiants de licence à la pensée scientifique. Même les élèves brillants restent dociles face au savoir, et, bien qu’ils feront certainement de bons techniciens (ici de la communication), ils le seront sans avoir assimilé auparavant les objets dont ils se serviront (et paradigmes sociétaux qu’ils serviront). Ils seront incapables de pensées ou recherches scientifiques personnelles innovantes. J’ai noté d’ailleurs le manque d’intérêt des étudiants aux notions théoriques qu’ils sont pourtant amenés à devoir maîtriser.

On peut supposer que beaucoup de décrochages scolaires viennent d’un manque de prise en main des outils et processus d’apprentissage, puisque à leur arrivée en faculté, ils sont dépourvus de formation sur l’organisation du travail intellectuel et restent «scolaires» dans leurs approches des supports de cours.

 

«Le bachelier est ignorant, la chose est certaine; mais malheureusement il est encore beaucoup plus inapte à s’instruire.»

(Lavisse cité par Dr P.Chavigny)

 

Point de départ et proposition

A Lyon II, un créneau horaire existe pour la méthodologie. J’ai pu observer (et vivre) des cours où l’on révisait les protocoles de rédaction typiques: des commentaires de texte, dissertations, exposé, etc. Je ne crois pas à l’utilité de cela, puisque ces indications sur les formats à utiliser sont facilement trouvables sur le net. Un cours de méthodologie est pourtant bien nécessaire.

 

Je suis donc partie de l’idée qu’il manque, à l’arrivée en faculté, un cours de propédeutique générale et propédeutique des sciences. Je m’explique: propédeutique est un mot déjà utilisé en médecine pour désigner l’ensemble des notions que les étudiants doivent intérioriser avant d’aborder l’étude clinique des cas. Le Dr P.Chavigny, dans son livre Organisation du travail intellectuel (1919, librairie Delagrave), propose le nom de propédeutique générale pour l’ensemble des méthodes et outils de travail intellectuel.

Je propose à mon tour propédeutique des sciences pour parler des éléments théoriques et des conseils pratiques nécessaires préalablement à la formation scientifique. Ces éléments ne sont que très rarement enseignés à l’université. Pourtant, chaque étudiant devrait pouvoir construire son système de pensée; d'après mon expérience personnelle, je défends le fait qu’intégrer l’épistémologie et l'histoire des sciences à ce système est absolument nécessaire pour se rendre compte des enjeux des sciences aujourd’hui.

Mon projet est d’amener l’Université de Lyon 2 à proposer, dans le cadre des cours nommés Méthodologie, ces propédeutiques: c’est-à-dire les méthodes d’apprentissage et de production ainsi que les problématiques spécifiques à la pensée scientifique.

 


 

Le but est que l’étudiant commence à se poser les questions suivantes:

  • Qu’est-ce que la science? Les sciences? Quelles en sont les conditions de production, de validité?

  • Comment la science d'aujourd'hui s'est construite ? Quels sont les liens entre la société, son histoire et les sciences ?

  • Qu’est-ce que la connaissance? Et l’apprentissage?

  • Comment apprendre, avec quels outils?

  • Comment produire, écrire?


 

 

Mon hypothèse est qu'un étudiant suffisamment informé et intéressé par ces questions-là aura moins de raisons de décrocher de l'université puisqu'en plus de pouvoir explorer ses propres méthodes d'apprentissage, il aura la possibilité de construire, en toute conscience, un système de pensée qui lui servira de grille de lecture sur le monde et sur le savoir scientifique (qu'il soit transmis par ses professeurs ou recherché par l'étudiant lui-même). Ainsi l'étudiant ne maîtrisera plus seulement quelques concepts épars qui suffiront à réussir les examens de semestre: il aura les clés pour s'approprier et réfléchir sur tout un ensemble de notions qui lui serviront à construire son esprit scientifique.

 

 

Programme de cours

  1. Science et connaissance

    1. Épistémologie: Les sciences, ses critères, ses méthodes (Popper, Feyerabend). Spécificités des sciences souples.

1.2 Discontinuité et histoire des sciences: La société et la science (paradigmes, consensus, épistémè et Foucault)

    1. Connaissance: processus (donnée - information – connaissance) et catégorisations, pluridisciplinarité

    2. Connaissance: types (croyance, représentations, savoir profane, construit, scientifique)

    3. Construire un savoir scientifique (accumuler, autocorrection, obstacles épistémologiques Bachelard) et grilles de lecture

2. Apprentissage et méthodologies personnelles

2.1 Apprendre à apprendre (intelligence, incertitude, erreur, processus de transformation)

2.2 Organisation espace-temps (PERSONNEL! Fac, notes, activités extrascolaires, sérendipité)

2.3 Outils mémorisation (mnémotechnique, schémas, mindmap)

2.4 Outils réflexions (ressources/bases de données, étymologie, symboles, lectures)

2.5 Rédaction (forme et fond. Argumenter. Types de formats d'écriture)

 

Ce programme est provisoire dans sa forme, mais je voulais ici montrer les éléments nécessaires qui le composeront.

 

Didactique du cours

J’ai bien conscience que ce programme semble chargé au vu de l’étendue et de la profondeur des notions abordées. Pourtant je persiste à croire que ces notions sont simples à assimiler si elles sont transmises de manière pertinente. Le but n’est pas que l’étudiant accumule des informations, mais qu’il les transforme en connaissance intériorisée qui puisse lui servir de grille de lecture sur les notions scientifiques qu’il aura à comprendre tout au long de ses études.

Un cours en classe est un jeu de relations et d’interactions permanentes entre trois corps: les apprenants, l’enseignant et les savoirs/notions transmis. Il est nécessaire de créer une situation didactique adaptée, il faut donc réfléchir aux aspects matériels et organisationnels de la situation «classe». Autant que sur le fond, je travaillerais sur la forme transmissible de ce programme (ici en un semestre, 21h de cours). Je ne veux pas le segmenter en plan de cours figé (même s’il y aura une version écrite rédigée), mais en faire un tissu où l’enseignant puise sa matière de discours et d’interactions.

 

Supports et contenus du cours :

  • En classe, discours:

  • Être professeur: c’est-à-dire donner un vrai cours et non un remake pédago-démagogique

  • Curiosité: anecdotes sur l’histoire des sciences, listes d’ouvrages et d’articles

 

  • En classe, interactions:

  • Discussions, les amener à débattre, et surtout à poser des questions.

  • Individualiser le plus possible les cours, quitte à assurer un suivi et un échange en ligne si effectifs chargés

 

  • En classe, actions:

  • Schémas, dessins, mindmap (à partir de textes ou pour révisions)

 

  • Élève autonome, rêveries du promeneur solitaire:

  • Accès au cours en ligne

  • Accès à textes annexes en ligne

  • Incitation à rechercher en autonome les éléments qui leur manquent (sérendipité sur le net + Encyclopedia Universalis et autres ressources)

  • Logiciel de mindmapping (FreeMind)

 

Évaluations:

  • Faire schéma à partir d’un texte (dans un corpus de quelques textes)

  • Écrire en défendant un point de vue sur une question donné (dès premier mois, puis correction, et même question quelques mois plus tard, deuxième note seulement prise en compte)

 

 

Bibliographie

  • Organisation du travail intellectuel, Dr P.Chavigny, Librairie Delagrave, 1919

  • Cours «Épistémologie et processus de théorisation», Patricia Mercader (Psycho L3)

  • CHALLAYE Félicien - Les principes généraux de la science et de la morale. 3e année des écoles normales. Programme du 20 août 1920. Éditions Fernand Nathan. 1922.

  • Gustave Le Bon, Psychologie de l'éducation

  • Feyerabend, Thèses sur l’anarchisme épistémologique

  • Foucault, Les mots et les choses

  • Site de l’Université Lille 3 (CRL Centre de Ressources en langue), travail de master de C.Gallois: http://crl.univ-lille3.fr/apprendre/

  • Ressources en ligne autour du concept de Mindmap

  • Encyclopedia Universalis, «Épistémologie», «Science», «Heuristique»...

 

Publicité
Publicité
22 juillet 2012

Les notions de public en sciences sociales

Comment définiriez-vous un « public » ?

 

Nous voudrions préciser, afin de cadrer un peu les possibilités de définitions qui suivront, que nous prendrons le terme de « public » en tant que nom masculin, et non en tant qu’adjectif, ce qui exclura notamment l’étude de l’espace public en tant que tel ou du vocabulaire juridique concernant le droit public.

Le terme « public » trouve son origine dans le latin « publicum », forme contractée et dérivée de « populicus », qui lui-même vient de « populus » (peuple) et de « pubes » (désignant la population mâle pubère). Etymologiquement, le nom public signifie donc « du peuple ».

De nos jours, le mot public renvoie à diverses réalités sociales, il prend plusieurs significations selon son contexte d’énonciation. Ainsi, il est souvent donné en synonyme de lectorat, d’audience, d’auditoire, d’usagers, de spectateurs… Le terme « public » peut également se référer au fait de faire partie d’un ensemble d’usagers d’un service (transports, commerces, organisations). On peut dire aussi que le corps électoral constitue un public, puisque certains proposent des sondages d’ « opinion publique ».

Le point commun de ces diverses définitions est qu’elles renvoient toutes à un collectif social, abstrait ou réel, un ensemble d’individus fondé apparemment par un intérêt, une action qu’ils ont en commun. En plus de cette chose en commun, le public est défini en tant que récepteur ou usager, donc toujours défini par rapport à un pôle émetteur qui crée et propose.

 

On se demande quelles sont les choses que les membres d’un public ont réellement en commun. En effet, les individus réceptionnant ou usant la même production émettrice ont-ils en commun, et de la même manière, l’intérêt porté à cette production ? La même attitude et les mêmes pratiques  face à cette production ? Ou encore, est-ce que ce public réunit des individus ayant les mêmes conditions sociales ? Le même capital économique, culturel ou symbolique ?

On pose donc la question de l’homogénéité du public. Contrairement à ce que le sens commun puisse nous faire penser de prime abord, un public est hétérogène malgré son action commune. De plus, il semble ne constituer un collectif social réel et communautarisé que dans certains cas précis.

 

Pourtant aujourd’hui, on parle souvent de « grand public », en référence au public auquel est destinée la culture « de masse », c’est-à-dire les productions de l’industrie culturelle.

Adorno et Horkheimer utilisent pour la première l’expression « industrie culturelle » dans leur ouvrage Dialectique de la raison. Ils montrent que le domaine des productions culturelles est soumis à une industrialisation et poursuit des buts de commercialisation. Les auteurs de l’Ecole critique de Francfort dénoncent ce processus d’industrialisation culturelle, déterminé idéologiquement, qui s’adapte aux publics, aux masses, uniquement pour « affermir et corroborer leur attitude qu’elle prend a priori pour une donnée immuable », et qui leur impose des schémas de comportement. (cf. Adorno, article « L’Industrie culturelle », 1er§). Les critères de constitution d’un public sont ici déterminés extérieurement à l’ensemble de personnes qui est considéré comme tel. Les différents publics sont alors constitués en cibles marketing homogénéisées et standardisées.

 

Définir un public n’est pas une chose aisée vue la diversité de sens attribués à ce terme, ainsi que la pluralité des réalités et abstractions auxquels il renvoie. Nous verrons que ces difficultés se retrouvent lorsqu’il s’agit d’étudier un public. De plus, on peut considérer, depuis la montée de la valeur d’image des marques (qui supplante sa valeur d’usage) dans les années 80, que la définition d’un public lui est surtout extérieure et prédéterminée.

 

 

Comment peut-on connaître un public ?

 

 Plusieurs méthodes ont été conceptualisées dans le but de pouvoir « connaître un public ». Nous allons revoir tout d’abord les enjeux et objectifs d’une étude des publics, avant d’évoquer les principales difficultés auxquels un chercheur peut faire face lors d’une étude d’un public. Nous donnerons un aperçu de quelques méthodes d’études.

L’étude d’un public a pour objectif d’apprendre à le connaître, afin le plus souvent d’engager des modifications de l’offre, en vue d’optimiser l’impact sur ce public (dans le cas des publics soumis à la loi du marketing offre/demande), ou encore de comprendre comment ce public fait usage et quelle est son attitude face aux productions émettrices.

Vu la diversité des individus, des attitudes, des usages et des pratiques réunis sous ce terme de public, le chercheur sera confronté à plusieurs difficultés. Il s’agit en effet d’étudier un collectif social, souvent abstrait dans le sens que les individus y sont réunis plus souvent symboliquement que physiquement. Il ne faut pas tomber dans les écueils ouverts par la sociologie des publics, c’est-à-dire considérer les individus en tant qu’agent social, agissant à l’intérieur d’un champ de relations de pouvoir (et non uniquement en tant que récepteur/public).

 

Selon la nature des données que nous voulons récolter et analyser, on peut envisager de faire une enquête quantitative, qui répondra aux questions de « qui ? » et « combien ?», et/ou une enquête qualitative, qui devra répondre à « pourquoi ? » et/ou une observation ethnographique (question « comment ? »).

Les enquêtes quantitatives sont utiles pour connaître, en chiffres et en quelques grandes questions, qui fréquente le lieu ou qui fait acte d’accès au statut de membre du public, ainsi que pour permettre de donner un aperçu des attentes et satisfactions. Cependant, les enquêtes quantitatives telles que le sondage répondent aux lois des grands nombres et la représentativité d’un échantillon est toujours délicate à construire et à interpréter comme telle. De plus, face à certaines problématiques, certains individus interrogés se réservent le droit de non-réponse, ce qui rend le résultat difficile à calculer avec justesse.

Les enquêtes qualitatives nous donnent un meilleur aperçu de la subjectivité des individus constitués en public, comment et pourquoi ils construisent leur pratique, quelle est leur attitude face à une production. Cependant, il faut garder à l’esprit que parfois, les individus risquent de faire ressortir les représentations sociales les plus acceptées et non les leurs, notamment dans le cas des publics où l’individu a du mal à se concevoir comme tel (par exemple, il fait acte d’achat sans vouloir s’identifier comme membre du public). Dans le cas des entretiens, l’analyse du discours a une place importante.

L’observation ethnographique nous aidera à observer les comportements du public. Cette observation ne peut se faire uniquement où le public est observable, c’est-à-dire où il est physiquement réunis et constitué. C’est le cas de l’usage des lieux de concerts, de culture, etc. On se demande si le public des médias, notamment d’internet, est réellement observable dans ses pratiques et comportements. La création de communauté réelle autour d’une pratique culturelle (exemple : les groupes de jeunes se réunissant autour de quelques marques (musiques, vêtements) et s’identifiant à eux) sera observable et permettra de mettre en lumière certains comportements face aux produits.

 

 

De quelles structures ou quels évènements êtes-vous « public » ? Comment définiriez-vous ces publics dont vous faites partie (au moins un public) ?

 

Nous pouvons tout d’abord reformuler la question : Comment se concevoir comme étant membre du public ? Quelle sont les étapes qui donne le statut de membre du public ?

Le statut de membre d’un public s’acquiert par les actes: la visite d’un musée ou l’usage d’une bibliothèque municipale vous rend membre du public d’un musée. Ici, cette étape d’accès au statut de membre de public est réelle, et engage physiquement l’individu (les individus). D’autres types d’étapes sont d’ordre symbolique, qui engage l’individu moins physiquement, ce qui rend la définition concrète du public plus difficile à élaborer puisqu’on n’est plus sûr de la corrélation entre le statut de membre du membre et les pratiques réelles.

Le statut membre d’un « public » constitue peu à peu un collectif. Selon les théoriciens de l’Ecole de Francfort, le statut de membre d’un public des individus, ceux-ci étant constamment interpellés par des instances médiatiques, administratives et commerciales, peut devenir une « nature », où l’individu se reconnait et finit par s’interpeller lui-même en tant que public (ici, synonyme de membre d’une communauté fictive, usager ou de consommateur).

 

Personnellement, il m’est difficile de me concevoir comme membre symbolique d’un public. Cependant je fais acte d’achat pour certaines productions culturelles, je fais donc partie de certains publics. Mais je refuse de me définir comme tel puisqu’avant d’être membre symbolique de public consommateur, je reste un individu réel et ne préfère pas décrire en mon nom les pratiques/usages d’un tel public en tant que collectif.

3 juillet 2012

Humeurs

Apologie de la flemme

On me dit que je suis flemmarde. Eh bien, puisqu'on semble vouloir ce point de vue sur mon être, je peux parler de moi en rajouter ce trait imposé: la flemmardise fait partie de mon être, puisque vous m'entourez de cette idée. Alors pensez qu'elle m'a été salvatrice. C'est peut-être la flemme de me lever le matin, de bouger de mon livre, de FAIRE, d'accomplir des choses de la vie quotidienne qui m'ont mené au point de départ toujours renouvelé d'une agogie devenue féroce et enfouie, ancrée. A ma flemmardise, j'y ai gagné la poésie. J'y ai trouvé un mode de vie, un regard, une arme pointée sur l'implacable grande machine. A cette flemme j'y ai trouvé aussi
mes premières périodes de liberté, puisque c'est elle qui chaque matin me disait "N'arraches pas tes draps, Pourquoi ? mettre des vêtements? marcher au pas?" Et c'est peut-être en elle que j'ai trouvé l'art de mentir et de me battre, afin d'entrevoir enfin un temps libre, allongé,et non en ma propre volonté de me sortir d'institutions et de relations emprisonnées. A cause de ma flemmardise. Si vous voulez.


 

La condition humaine à 37,2°

Paf, il se réveille, hébété, dans une grande salle vide.
Le clic est dur, ses oreilles pincées,
Cordes à linge sur un simple fil.

Ses pieds pendent au-dessus d'une immensité,
et là il se décide
à parcourir l'espace autour de lui.

D'abord il voit qu'il n'est pas seul accroché
Un jouet usé se ridule
Des forêts de papiers s'enridiculent.

Et puis flottent devant ses yeux,
des lézards endimanchés, la langue fourchue exorbitée,
mais aussi une grande échelle qui tombe, qui tombe,

des tiroirs à bidule,
des villes, des souliers,

des enfants maigres qui disent à leur maman
Mère, quelle onde de rosée!

Et cet homme se détache, un lobe douloureux,
un pas puis l'autre, cet autre deviendra
toi, et tous les toi.

A la main seule tu te laves.


 

Une brise sur le carrefour, des bruits de moteurs, des enfants crient.
C'est le dernier jour d'école: ô liberté!
Toute l'année, ils se préparent avec application
à s'inculquer, à devenir indirectement meurtriers.
On n'y apprend rien du monde qui nous entoure,
ni de ce qu'implique le fait d'être mammifère.
J'aurais voulu y apprendre la carte des feuilles,
on donne plutôt celle du rêve de l'escalier.
Une brise sur le carrefour,
un enfant la caresse du doigt et demande:

Pourquoi le vent?

 


 

Il faut d'abord vivre. Mais cette vie c'est quoi ? Il n'y a pas de chemin, j'en suis perdue. Là où je vais il manque une route, trop dense existence. Mais personne n'a touché cette forêt qui recelle bien des choses, où un lion féroce se tiendra debout, une coccinelle murmurant à son nez, et l'escabeau a disparu, j'étais bien embêtée.
J'ai parcouru ces bois en tout sens, arbre par arbre, puis feuille par feuille, puis fourmi par fourmi, j'y suis resté des heures. Je faisais pareil avec les humains, je scrutais les yeux, soulevais les lèvres supérieures, tâtais le poul et je mesurais l'écart entre leur tête et leur ongle du troisième doigt. Nous parlions, nous parlions, et j'ai toujours préféré les forêts où je pensais ma vie.

 


 

Mon image, j'y tiens peut-être.
Mais pas tant que ça
Pas tant qu'eux,
Pas tant.
Ceux qui l'accrochent en marge,
Ceux qui l'affichent
sur soixante mètres de long à l'entrée de la ville,
Ceux qui s'en drapent,
Ceux qui l'avalent et s'entêtent.
Avec cette image,
qu'ils recoivent et fabriquent,
j'ai joué autrefois.
Et je m'en défais en trouvant le point de moi-même.

 


 

Je tombe parfois dans des ténèbres absurdes où pas un mot n'est prononcé, ni pensé, ni rien.
C'est une petite boite souvent violée qui libère son flot opaque. Et quand je dis que j'y tombe, c'est mince: ça m'envahit, ça me possède, ça me tient là, immobile, les yeux révulsés et je joue au jeu des trois singes. Je ne sais ce que c'est, et ma raison n'y accède. Elle cicatrise parfois, je serais mieux sans mais elle est là, et je suis dedans. Alors je voudrais faire une boule de moi-même, entrer dedans, fermer la porte, et voguer dans ses affres insonsables.

Mais lorsque je tente de tourner la poignée, on m'interpelle à une réalité que je n'ai pas choisi, alors plutôt que de l'accepter je la fuis, je tourne le dos, et va m'enrouler ailleurs.

 

19 juin 2012

Université, sens critique et méthode d'apprentissage

Après deux ans à l'université, voilà un triste bilan.
Pourquoi les amphithéâtres sont-ils remplis de poufiasses qui se regardent les ongles tout en apprenant que Marx a révolutionné la conception de l'homme? On pourrait dire à la plupart qu'ils sont totalement déterminés et conditionnés, ils ne réagiraient pas. Ils apprennent leurs cours afin de passer correctement l'examen, et ils y réussiront! Nous avons eu des examens sous forme de QCM (en sciences humaines, quand même). J'ai entendu des étudiants en master se vanter de n'avoir pas utiliser leur cerveau en sortant d'un partiel!


Où est passé le sens critique des universitaires? Si on peut toujours soutenir mordicus que certains l'ont, quid de la transmission de ce sens critique ? Parlons à des étudiants, qu'ont-ils appris à la fin de leur licence ?

L'université donne-t-elle le goût d'apprendre, et par là d'auto-corriger ses perceptions? Peut-on être holistique dans nos études?

Je n'ai rien vu de tout cela, et j'ai donc fait le choix de me libérer le plus possible du joug de l'administration. Ainsi, je ne vais qu'aux examens et j'étudie seule en faisant par correspondance. Les réactions les plus ordinaires me reviennent lorsque j'affirme cela. Beaucoup de personnes savent que les institutions ne sont pas adaptées à leur méthode de travail, mais continuent de s'accrocher car ils pensent ne pas être capable d'être autonome. Et bien, cela s'apprend. Ce n'est pas tant une histoire d'organisation que de curiosité et de passion pour les choses étudiées. Si vous saviez le nombre de sujets dont vous avez pensé qu'il était inintéressant, alors que c'est le professeur, l'institution et le cadre dans lequel vous étiez qui vous ont convaincu de cela!

 

diegoriviera

Il faut commencer à apprendre à apprendre. Travailler sa mémoire, le sens et la justesse de nos réflexions, auto-corriger ses perceptions et représentations de sens commun, bref, construire une connaissance. Il ne s'agit pas une accumulation de savoirs à ressortir dans les dîners mondains.

Pour étudier seul, rien de mieux que d'apprendre à réflechir et à mémoriser. En étendant une thèse vers une pluridisciplinarité, en pointant un manquement de réflexion, en rappelant le contexte et en ajoutant une critique, en posant des questions amenant d'autres recherche à faire, je pense que l'on mémorise beaucoup mieux... Le but étant de ne pas réécrire des paraphrases sur les textes ou théories étudiées, mais noter des réflexions qui vous est propre. Ici la mémorisation devrait être avantagée, puisque la réflexion se fait au-dessus du cours. Les informations données par le cours en lui-même seront plus naturellement intériorisées, étant transformées d'objet en support de réflexion.

Plusieurs techniques de mémoire sont très utiles et devraient être enseignées dès le plus jeune âge.

J'utilise beaucoup, dans le cadre de mes cours et dans bien d'autres cas, les mindmaps.

19 juin 2012

La chat-ambre-obèse-cure molochéenne

Il était une fois Moloch et ses gogos.

Il est, dans un ni si lointain ni si grand pays, un tout-relationnel Moloch d'où ruissellent bien d'étranges pouvoirs. Moloch-argent, Moloch-travail bâtit sur la famine et la misère. La liberté d'expression est là quand tu la paies. Esclavage! Les gogos travaillent pour leur liberté, car liberté = argent et montée d'escalier.

Il est aisé de tromper les gogos quand des fables de théière circulent depuis 2000 ans. Est-ce qu'on attend vraiment un Palican et une Eléa pour que les jeunes du monde se mettent à défiler dans les rues en criant "Pao" ? Je veux dire, vraiment? Vous y croyez, vous, à tout cela?

La pensée des gogos est remplie de

ce que je décompose en la chat-ambre obèse-cure. Chambre car lieu de savoir tout de même*, obscure car pleine de faussetés idéologiques.

Et certains se demandent : « Quid de l’avenir’ tant que ces chambres-esprits seront noircies ? Tant qu’ils verront la réalité renversée? Ha ! Palais de mémoire, ouverture de porte, tant d’images** et d’outils sont disponibles pour sortir de la chambre, et pourtant ils restent tous là, à leurs barreaux enchaînés, et ils dorment, sondables ! -les yeux fermés. Bouh ! Secouez-vous, l’agitation vous gagne, et vous finirez, un jour par prendre les armes, tout en restant dans l’obscurité ! Argh ! L’idéologie dominante vous détermine, sachez au moins ce qu’elle dépose dans vos pensées. »

Un beau jour, on découvrit la camera obscure qui figea des fragments de continuité.

chambreobscure

Ils étaient parfaits les voleurs de foudre, laissant de côté les chiots sur quatre générations! Parfaite la matrice en laquelle je tourne, moins réglée qu'Horloge, madame temps! Vous, qui m'entendez ?

Moloch en qui je me débats, frappons tête contre murs! Corps sur corps!

La biologie n'a plus d'Incidence, enridiculqué! Moloch = agonie, inertie, de Roger, le crapaud et la colombe, tous éduqués! Apathes, vous êtes les heureux dénonciateurs dont Moloch parle au travers de. Que leur avez-vous fait, aux Mots, pour qu'ainsi ils se tordent ?

Moloch branlette intellectuelle et démagogie. Horloge était une part constituante de Moloch. Une seconde, une heure, un jour, un an. Ou dix. Qu'est-ce que le temps ? Une journée commence-t-elle à huit heures du matin, ou bien lorsque le soleil se lève? Des heures et des dates. Le temps est-il une chose qui s'écoule alors qu’on pourrit sur place? Angoisse exactement, stress à l’heure-pile: le temps, cette chose indéfinissable, ou bien l'horloge, bien trop définie? Un code normatif de plus.

Ces codes nous enserrent dans une cellule perceptive et représentée. Beaucoup restent encore esclave et entrepreneur de Moloch. Certains se débattent, d’autres se libèrent.

Publicité
Publicité
19 juin 2012

Trigrammes du Livre des Transformations (Yi-King)

Le Créateur Créateur en une seconde formant un tout, nouveau pas de l’homme.

Le Réceptif Réceptif avec une multitude maturée dans des années de gestation. La vache mère de la terre, sur laquelle une étoffe s’étend.

L’éveilleur Eveil comme un tonnerre qui gronde puis éclate. L’éveilleur éveillé comme un dragon jaune sombre, premier fils de la mère et du père.

Le Doux Doux comme des cuisses contre lesquelles le vent se presse, comme le bois sans âge qui étreint de ses bras le temps. Doux et qui pénètre la belle éternité.

Ce qui s’attache Ce qui s’attache comme lorsqu’un éclair brillant s’attarde sur l’œil. Un oiseau de feu, un plein qui cache un creux comme une cuirasse sèche.

L’Insondable Insondable comme l’eau qui se bat et se transforme depuis des millénaires, comme l’arc courbé et recourbé qui se prépare à recevoir la flèche, insondable comme du sang dans la fosse, le lac est un constituant premier de cette sacrée cambrure.

L’immobilisation Immobile comme la montagne qui n’en aura jamais fini son tour du monde. Immobile comme un temps de calme avant une décision tempête.  La graine est immobilisée, avant de germer et croître.

Le joyeux Joyeux comme une jeune fille gambadant au bord de la falaise. Toi la voisine, la magicienne, tu es la bouche.

creation_trigrammes

18 juin 2012

Pourquoi Bush a-t-il été réélu ?

La stratégie de campagne électorale de Bush pour sa réélection en 2004.

bush


Après des primaires démocrates plutôt serrées, ce fut John Kerry, alors gouverneur du Vermont, qui remporta la candidature le 2 mars 2004, lors du Super Tuesday. Il se présenta donc aux élections présidentielles contre Georges W. Bush. Le 2 novembre 2004,  ce dernier fut élu avec 50,73 % des voix, pour un second mandat, président des Etats-Unis d’Amérique.

Nous nous demandons comment cette réélection a été possible. Répondre à cette question nécessiterait d’étudier les années 2000-2004 aux Etats-Unis autant dans leurs aspects sociaux qu’économiques, militaires, médiatiques et politiques. Nous essayerons du moins de connaitre plus particulièrement la stratégie de communication de Bush lors de cette campagne électorale 2004.

Plusieurs points nous paraissent importants afin de mieux comprendre cette stratégie. Nous allons d’abord revenir sur les principaux communicants politiques gravitant autour de Bush. La victoire de Bush a été souvent considérée comme étant acquise grâce à la récupération du vote des chrétiens fondamentalistes et évangélistes. Nous verrons donc le contexte religieux propre aux Etats-Unis et les principaux points stratégiques mis en place pour récupérer ce soutien. Ensuite, nous verrons les différents dispositifs de communication mis en place, notamment l’utilisation à visée électorale du microtargeting. Enfin, nous reviendront sur le déroulement de la campagne contre Kerry, notamment sur les différents moyens de dénigrement politique et personnel du candidat.


Quels sont les acteurs de la communication électorale 2004 de Bush ?


karl rove   Georges W. Bush, dès sa première élection en 2001, s’entoura d’une équipe chargée de préparer sa réélection. Plusieurs personnes, souvent méconnues en France, ont ainsi eu le rôle de conseillers auprès du Président. Son dispositif de communication pourra ainsi être compris par le biais de l’étude de son gouvernement, ses acteurs, leurs fonctions officielles et officieuses, les dépenses faites, etc.
Karl Rove (photo ci-contre) fut appelé par Bush, au lendemain de sa réélection en 2004, « l’architecte » de cette victoire. Cet homme fut conseiller et stratège au service de Georges W. Bush, de 1993 à 2007, alors que ce dernier était gouverneur du Texas puis président des Etats-Unis. Compétent, incisif, ambitieux, sans toutefois avoir réussi à décrocher un diplôme universitaire, c’est un ami de longue date de la famille Bush, le président le surnommait « Fleur de fumier ».

Michael Gerson, un évangéliste, écrivait les discours de « W », dont le mémorable dans lequel Bush parle, à propos de l’Iran, l’Irak et la Corée du Nord, d’un « axe du mal ». Deal Hudson était chargé de l’électorat chrétien, et multipliait les contacts avec le Vatican.

Selon certaines sources, Matthew Dowd, John Dilulio et Jan van Lohuizen ont également été des acteurs de cette stratégie. Malheureusement, il est difficile d’accéder à des informations fiables en français sur ces personnages, surtout que John Dilulio a par la suite critiqué la stratégie du gouvernement Bush.


Contexte et rôle de la religion dans la stratégie électorale de 2004


Une religion civile, et une Amérique profonde évangéliste
Aux Etats-Unis, le rapport entre politique et religion est différent du principe de laïcité français. La religion a une place importante dans l’histoire et dans la société américaines. Le premier principe de la Constitution établit la séparation en énonçant que « Le Congrès ne fera aucune loi pour conférer un statut institutionnel à une religion, ou pour en interdire le libre exercice. »
Dans les années 1830, Tocqueville soulignait que le protestantisme est profondément lié à l’établissement de la démocratie américaine. Depuis, bien d’autres communautés religieuses se sont intégrées à la société américaine. Cependant aucune confession n’a jamais été érigée en tant que religion officielle. Pourtant, il reste des liens étroits entre la religion et le gouvernement américain. On parle de « religion civile ».
En effet, Dieu est omniprésent aux Etats-Unis, à commencer par sur leur monnaie, où le slogan « In God we trust » est inscrit. Les sessions parlementaires s’ouvrent sur une prière. 90% des Américains sont croyants, et presque la moitié d’entre eux déclare une pratique religieuse régulière.   
Plus de la moitié des Américains sont protestants. Depuis plusieurs décennies, on constate à une montée des cultes conservateurs, tels que les évangéliques, les fondamentalistes chrétiens ou les Born again.  Ainsi, 46% des Américains  sont évangélistes ou Born again » (littéralement, « né de nouveau », c’est-à-dire ayant connu un éveil à la foi). Les évangélistes ont une couverture médiatique croissante. En une vingtaine d’années, les méga-churches se sont répandues et on en trouve plus de 700.
La vie religieuse aux Etats-Unis est donc une réalité à prendre en compte dans le champ politique. Dans certains états, certains groupes sont très représentés et souvent puissants, comme les mormons en Utah, les amish en Pennsylvanie (qui possèdent leur propre comté !) ou les fondamentalistes dans la zone appelée « Bible Belt ». Cette zone recouvre le quart sud-est des Etats-Unis, on y trouve des états anciennement sécessionnistes tels que l’Alabama, l’Arkansas, la Caroline, la Louisiane, l’Ohio ou encore le Texas.

megachurch


Une stratégie pensée en fonction de ce contexte
Les stratégies de Bush ne cherchent plus à conquérir le centre, ce qui revient à « gauchiser » son discours républicain au risque de perdre beaucoup de militants. En effet en 2000, Bush fut considéré « trop à gauche » par certains commentateurs conservateurs républicains. L’axe de la communication politique pour sa réélection cherchera donc à mobiliser la base des conservateurs, souvent abstentionnistes, dont plusieurs millions de chrétiens ou protestants évangélistes (souvent fondamentalistes ou Born again), donc en radicalisant le message et en l’adaptant à ce type d’électorat.
Plusieurs moyens stratégiques ont permis de mobiliser ces chrétiens conservateurs.
Vu l’importance et la place de la religion dans la vie des fondamentalistes, la campagne électorale de Bush avait donc tout intérêt à ce que les églises, pasteurs, catholiques et autres télévangélistes le soutiennent activement. Des mesures et déclarations ont été faites pour soutenir les valeurs qui leur sont chères.
Evidemment, la Bible Belt est visée par la campagne électorale. Le soutien de la Convention des Baptistes du Sud fut en particulier décisif. Cette organisation religieuse qui comptait alors 16 millions de membres. Selon Ronald Land, le directeur, des conférences téléphoniques hebdomadaires et bien d’autres rencontres furent organisées tout au long de la première présidence de l’administration Bush et de la campagne électorale de 2004.
Les catholiques furent aussi chouchoutés, comme en témoigne le rôle Deal Hudson, qui fut chargé d’être en contact avec d’éminents personnages catholiques et de mobiliser. Bush fut le premier président des Etats-Unis à assister aux cérémonies de funérailles d’un Pape (Jean-Paul II), il lui rendait souvent visite afin de médiatiser son soutien aux valeurs chrétiennes catholiques et aux idées du Vatican sur l’avortement, le mariage, etc.
Ainsi, les organisations religieuses prennent en charge la diffusion des idées et du personnage du Bush à leurs membres et leur enjoignent d’aller voter.
Les grands thèmes de campagne, outre l’assurance du respect des valeurs conservatrices, furent notamment la menace du terrorisme, la guerre en Irak (dont Kerry a fini par proposer l’arrêt), le mariage gay (Le maire de San Francisco venait de marier 3000 couples homosexuels et ils ont su profiter de la vague d’indignation des conservateurs) ou encore le droit à l’avortement.

Quels dispositifs de communication politique furent mis en place ?


Une utilisation du microtargeting en politique
L’utilisation du microtargeting permet à la campagne électorale de Bush de se diffuser en profondeur, de manière personnalisée grâce à la connaissance des pratiques et préférences des électeurs américains.
Le microtargeting est une technique marketing utilisée notamment en politique, qui tente de définir le plus précisément possible l’identité de chaque électeur. Cette technique est permise par le recours à des data base d’électeurs (et d’électeurs potentiels), notamment Voter Vault, qui a été constitué par les républicains il y a une dizaine d’années. L’administration de Bush l’a utilisé et aurait également acheté l’ensemble des données disponibles de plusieurs entreprises qui s’occupent de rassembler des informations sur la population.
Ce recours aux informations personnelles des citoyens, et le microtargeting, sont très utilisés par des entreprises multinationales. Toutes sortes de données sont ainsi disponibles : l’âge, le comportement de vote et préférences politiques, le revenu, les abonnements à des magasins, revues, églises, son utilisation des médias, son niveau d’étude, l’école de ses enfants, etc.
Après une segmentation et un découpage de l’ensemble de la population, on organise des modèles qui déterminent plusieurs électeurs-types. Il s’agit alors de réfléchir aux arguments qui convaincront le mieux un type d’électeur donné, et à lui envoyer. Ainsi, la communication devient très personnelle et adaptable à chacun. Cela permet d’épargner la susceptibilité des électeurs puisque celui-ci sera toujours assuré d’être d’accord avec le message envoyé.

Un message adaptable et des dispositifs divers
Une image de Bush adaptée à chacun va être mise en avant. Quel type de message est émis à quel type d’électeurs potentiel ? Les possibilités d’utilisation de ces données et le maniement des messages transmis, dans le cadre d’une stratégie électorale, peuvent être infinies puisque combinée à plusieurs dispositifs de communication. Nous allons rapidement voir les différents moyens de communication mis en place.


georges-w-bush-finger
Les moyens de marketing direct sont nombreux et en 2004 déjà, les nouvelles technologies ont jouées un rôle important.  

Des emails et autres courriers ont été massivement envoyés. Les messages étaient modifiés en fonction du destinataire afin que celui-ci soit toujours en accord avec le contenu du message. Par exemple, inutile d’effrayer une jeune femme qui possède une petite voiture et prenant des cours de yoga en lui envoyant des propos homophobes et pro-life (les religieux anti-avortement). Par contre, ce genre de propos intéressera surement un homme, la cinquantaine, et dont toute la famille fréquente une Eglise évangéliste.

Le GPS a été utilisé pour organiser la campagne des militants, par exemple pour trouver les parcours-types des sympathisants républicains  afin de placer des panneaux de campagne aux bons endroits.

Le site et blogs d’une campagne jouent un rôle important, notamment pour (dés !)informer les militants. Un blog personnel du candidat sert à humaniser celui-ci. La mise en avant de la famille de Bush aida celui-ci à faire valoir son respect aux valeurs du mariage religieux, etc.
Ayant vu que certains populations rurales utilisaient beaucoup la radio, ils ont préparé beaucoup de spots radio pour ce type de population, en se permettant de diffuser des messages très conservateurs et très à droite, puisqu’ils ont pris soin auparavant de vérifier que les radios choisies ne se captent pas en ville (où les urbains sont généralement plus modérés).


Dans le cadre de la campagne électorale de 2004, que peut-on dire sur sa stratégie de bataille contre Kerry, son adversaire démocrate ?
Karl Rove a eu pour mentor Lee Atwater, qui inventa le concept de publicité négative, en conseillant notamment Reagan et Bush père. Atwater utilisait couramment des techniques de campagne agressives : faux sondages, rumeurs, publicités ridiculisant l’adversaire, etc. A une conférence de presse, alors qu’il était en campagne contre le démocrate Tom Turnipseed, il fit poser à un faux journalisme des questions remettant en cause la santé psychiatrique de son adversaire.
Les méthodes utilisées contre le démocrate Kerry ont été tout aussi agressives. Certains points de la stratégie de l’équipe de Bush n’ayant pas toujours été mis au clair, on ne sait pas exactement ce qui a été déclenché, acheté et prévu par eux.
En août 2004, alors que Kerry vient juste d’être officiellement investi par la Convention démocrate de Boston, une série de vidéos sont massivement diffusées. On y trouve des vétérans du Vietnam, anciens compagnons d’armes de Kerry. Ils vitupèrent contre lui en disant qu’il a été lâche, les a abandonnés et qu’il n’a pas mérité ses médailles. Or Kerry disposait de cet atout d’avoir été un respectable vétéran du Vietnam, et ces vidéos, ainsi qu’un silence prolongé de la part de Kerry, ont entaché durablement cette réputation. Ces vidéos ont-elles été à l’initiative des vétérans ? Leur financement de la part de riches Texans nous permet d’en douter.
Kerry fut attaqué avec des spots TV le montrant arrogant, faisant de la planche à voile, entouré d’amis riches, et déconnecté des valeurs de l’Amérique profonde. Bush s’était lui montré en train de couper du bois. Kerry ayant, vers la fin de sa campagne, décidé de proposer le retrait des troupes américaines en Irak, il fut montré par les républicains comme étant incapable de protéger l’Amérique contre la menace terroriste.

jesusland


Nous voyons que la réélection de Bush en 2004 a été possible notamment grâce à sa forte stratégie de communication politique face à l’Amérique profonde évangélique et conservatrice. Son équipe se montra précise, compétente et loyale et forma une stratégie efficace grâce à la récupération de données personnelles sur les citoyens.

Note : Il devient difficile, en tout cas sur Internet, de trouver de réelles informations (ou même des références sérieuses) sur les personnes ayant fait partie de l’administration Bush et qui l’ont dévoilé et critiqué par la suite.
18 juin 2012

La contre-problématique de l'antipsychiatrie

« La contre-problématique peut exister pour quelques intellectuels mais elle n'a pas de force sociale bien qu'elle ait été reprise par un certain nombre de partis, de groupes. La vérité scientifique est soumise aux mêmes lois de diffusion que l'idéologie. Une proposition scientifique, c'est comme une bulle du pape sur la régulation des naissances, ça ne prêche que les convertis. »
(Pierre Bourdieu, L'opinion publique n'existe pas)

On note beaucoup de cas de discrimination dues aux préjugés sur les maladies mentales. Les représentations sociales ont des effets sur les comportements des individus, leur système de pensée, et a pour conséquence, dans ce cas, une réelle stigmatisation. Les effets négatifs de la stigmatisation sur l’individu présentant des troubles psychologiques, et sa famille, ont été démontrés.
Beaucoup de chercheurs se sont intéressés aux maladies mentales, à leur traitement, à leur étiologie, ainsi qu’au rapport psychologique d’un individu à la normalité mise en opposition à la folie, ou à l’état de maladie. Les stéréotypes circulant sur les maladies mentales sont nombreux, et le plus souvent s’écartent du savoir scientifique et psychiatrique actuel.
 
Par définition, il faut se rappeler que la science n’est que le savoir actuel scientifique. Beaucoup d'hypothèses circulent dans les milieux institutionnels et savants comme ayant déjà été prouvées. La controverse est alors permise et même moyen d’orienter la recherche. Les représentations sociales participent aux rapports idéologiques et donc à la construction des savoirs dits scientifiques. On retrouve ici, en filigrane, la notion d’épistémè de Foucault. Il faut donc différencier les représentations sociales « profanes » des représentations savantes et institutionnelles.
  La psychiatrie française est en difficulté. Pourtant d’autres manières d’exercer et de comprendre le soin aux maladies mentales semblent exister, notamment avec le courant dit « antipsychiatrique ».

DSC08320

 

  La lecture de Two Accounts of a Journey Through Madness, publié en 1991 et écrit par Mary Barnes et Joseph Berke (une “patiente” et son psychiatre), montre un exemple pratique des faits suivants : la prise en charge d’une personne schizophrène peut se faire sans médicament ; placer le médecin dans le rôle d’accompagnateur de la folie permet à la personne de −attention, banalité− se retrouver. Berke et d’autres chercheurs anglais ont théorisé et pratiqué, dans les années 60, ce qu’ils ont nommés « l’antipsychiatrie ».
 
L’antipsychiatrie est un terme utilisé pour la première fois par David Cooper dans son ouvrage Psychiatrie et Antipsychiatrie (1967). Ce psychiatre anglais est, avec Ronald Laing, le fondateur du courant de pensée du même nom. Plusieurs expériences de pratique antipsychiatrique ont été faites.
 
 
  Ce mouvement est proche des idées de l’école de Palo Alto, notamment en ce qui concerne les études sur les thérapies familiales, ainsi que de Marx et des théories sur la domination de la société et de l’idéologie sur l’homme.
Les idées antipsychiatriques nous semblent également aller de pair avec les recherches en psychiatrie comparée (transculturelles), qui ont mis à jour qu’il existe des syndromes spécifiques à une culture donnée.
Voici quelques proposititions antipsychiatrique: la maladie est comprise comme un fait social, en tant que symptôme psychotique de la société aliénante. La psychiatrie est alors vue comme une forme de répression sociale de la folie (avec le médicament et l’internement). On ne cherche pas à objectiver positivement la maladie. La folie est vue comme un voyage, le malade a besoin d’être soutenu et accompagné dans sa folie. L’opposition normalité/anormalité étant caduque, le discours de la folie doit être écouté.


   Les idées (apports conceptuels, théoriques et pratiques) antipsychiatriques nous semblent pouvoir répondre aux problèmes que pose la psychiatrie aujourd’hui en France, et prendre le rôle de contre-problématique, c’est-à-dire de problématique qui ne fasse pas partie du consensus accepté/imposé.  Ces représentations prennent notamment leur source dans un certain rapport à la folie, basée sur les oppositions normal/anormal, sain/malade. L’essentiel du mouvement antipsychiatrique est qu’il nous semble justement renverser certaines représentations basées sur un certain rapport entre normal/anormal, sain/malade.
   On peut se demander pourquoi la contre-problématique de l’antipsychiatrie (au sens large), qui propose de réfléchir à nos rapports à l’altérité et au conformisme, dans la société française d’aujourd’hui, et à une application dans les pratiques de prises en charge des maladies mentales de ces conceptualisations, n’est pas réceptionné, réfléchie et appliquée ? Cela ouvre la question de l’influence des groupes théologico-politiques (cf, J.Le Bohec) et financiers dans le monde de la psychiatrie française, ainsi que d’une considération des rapports de pouvoir, telle que Foucault nous la décrit (comme entrant dans « les plis subjectifs du social ») et de l’aliénation que dénonce Laing. La plupart des personnes étant en contact direct avec des "malades", et ayant un pouvoir sur eux (par le traitement, le soin, l’hospitalisation), véhiculent des idées faussées, reprises des représentations sociales profanes ou scientifique: cela démontre que les personnes n’ont pas accès à une contre-problématique et « jouent le jeu social ».

 

Extraction pierre de la folie jérôme boschL'extraction de la pierre de la folie, par Jérôme Bosch

Dossier complet (axé méthode de recherche en sciences sociales, sous format word):
18 juin 2012

Pour une stratégie de désobéissance civile

Ou De la nécessité d’instruire les cons

   « Ah ! Qu’il est difficile d’être le roi de la France ! » Qu’il est plaisant pour l’homme bien né d’avoir accès à une éducation que beaucoup d’autres n’ont pas, puisque cela lui donne plus de raisons de mépriser la plèbe, si ignorante selon lui. Cependant ce n’est là qu’une question d’instruction et non d’intelligence. Et avec l’école de la pauvreté, de la frustration, de la colère qui court dans les rues de ce XXIème siècle, une toute autre manière d’être instruit agite certains.
      L’agitation n’est que latente encore, car alors qu’une infime minorité de ces insurgés ont profité du marteau qui les opprimait pour se donner le goût d’apprendre bien des choses*, et notamment à connaître ce marteau, il faut bien avouer que la plupart des agités n’ont que peu d’outils. Donc je voudrais bien en partager. Il ne s’agit pas là de parler de cette révoltante (oups, le mot est dit) démocratisation culturelle, décrite par Lepage comme étant la volonté de cultiver les pauvres. Effectivement, quand on se représente assez bien les tendances dominantes de l’agriculture aujourd’hui, avec monocultures de masse et pesticides, on peut se rendre compte de ce que cette métaphore est appropriée, et joliment. Mais justement non, une démocratisation imposée se transforme inévitablement en une politique de démagogie, et il faut se concentrer sur ses propres outils, si ce ne sont des armes. Trop d’entre eux sont soumis au capitalisme et leur agitation n’est que trop consacrée aux idées de l’argent et de la réussite.
      Nous voudrions donc proposer certaines notions. L’agogie, pourra renverser, à force d’être acquise à chacun, certains biais cognitifs et représentations sociales. La permaculture représentera certainement, pour beaucoup, une solution à un certain nombre de problèmes majeurs -qu’ils soient économiques, écologiques et/ou sociaux - qui nourrissent les arguments du fatalisme.
     Certes, et voilà le nœud du problème, il reste à instruire les cons. Je le dis méchamment mais sans méchanceté. C’est pourtant vrai, et incertain quant à sa possibilité de réalisation. Là est le rôle de la communication, ainsi que de la mise en place immédiate de projets locaux, sur et autour de ce genre d’outils.
   Nous serons ainsi de plus en nombreux à penser et surtout à agir de manière cohérente et efficace. Il est plus que temps de préparer, chacun et ensemble, une stratégie face à ce que d’aucuns appellent Moloch. Le nombre 99% a bien besoin de s’instruire et de se reconnaître en tant que tel, et dans ses aspects les plus destructeurs. Pour le moment j’ai le regret de dire que la plupart sont un peu cons, vous ne trouvez pas ? Ce n’est pas les 1% qui me contrediraient.

39836_1541742660658_1147689712_3245486_5872980_n

(par pur plaisir du kitsch)

    Je parle de cons, cependant veuillez bien croire que cela n’est en rien méprisant. Je voudrais bien que Roger ne soit plus un Roger, et que ces gens s’agitant ou s’indignant le fassent dans de meilleures directions qu’actuellement, et apprennent à apprendre, à se développer et à préparer leur vie de façon à ce qu’elles s’intègrent en tout point dans leur environnement  (écosystèmes).
Arrêtons de nous agiter sous l’oppression. Commençons à construire, et à établir une stratégie agogique et permaculturelle de désobéissance civile (voir criminalité constitutive). 
Notes : En guise de rappel, nous sommes une espèce de mammifère vivant avec bien d’autres espèces sur la Terre. Culturellement, contredisez-moi si vous le souhaitez, cela reste un savoir étique (c’est-à-dire s’appuyant sur les connaissances rationnelles de la science).
Publicité
Publicité
Publicité
Newsletter
Publicité