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Démesure et pérégrinations
3 juillet 2012

Humeurs

Apologie de la flemme

On me dit que je suis flemmarde. Eh bien, puisqu'on semble vouloir ce point de vue sur mon être, je peux parler de moi en rajouter ce trait imposé: la flemmardise fait partie de mon être, puisque vous m'entourez de cette idée. Alors pensez qu'elle m'a été salvatrice. C'est peut-être la flemme de me lever le matin, de bouger de mon livre, de FAIRE, d'accomplir des choses de la vie quotidienne qui m'ont mené au point de départ toujours renouvelé d'une agogie devenue féroce et enfouie, ancrée. A ma flemmardise, j'y ai gagné la poésie. J'y ai trouvé un mode de vie, un regard, une arme pointée sur l'implacable grande machine. A cette flemme j'y ai trouvé aussi
mes premières périodes de liberté, puisque c'est elle qui chaque matin me disait "N'arraches pas tes draps, Pourquoi ? mettre des vêtements? marcher au pas?" Et c'est peut-être en elle que j'ai trouvé l'art de mentir et de me battre, afin d'entrevoir enfin un temps libre, allongé,et non en ma propre volonté de me sortir d'institutions et de relations emprisonnées. A cause de ma flemmardise. Si vous voulez.


 

La condition humaine à 37,2°

Paf, il se réveille, hébété, dans une grande salle vide.
Le clic est dur, ses oreilles pincées,
Cordes à linge sur un simple fil.

Ses pieds pendent au-dessus d'une immensité,
et là il se décide
à parcourir l'espace autour de lui.

D'abord il voit qu'il n'est pas seul accroché
Un jouet usé se ridule
Des forêts de papiers s'enridiculent.

Et puis flottent devant ses yeux,
des lézards endimanchés, la langue fourchue exorbitée,
mais aussi une grande échelle qui tombe, qui tombe,

des tiroirs à bidule,
des villes, des souliers,

des enfants maigres qui disent à leur maman
Mère, quelle onde de rosée!

Et cet homme se détache, un lobe douloureux,
un pas puis l'autre, cet autre deviendra
toi, et tous les toi.

A la main seule tu te laves.


 

Une brise sur le carrefour, des bruits de moteurs, des enfants crient.
C'est le dernier jour d'école: ô liberté!
Toute l'année, ils se préparent avec application
à s'inculquer, à devenir indirectement meurtriers.
On n'y apprend rien du monde qui nous entoure,
ni de ce qu'implique le fait d'être mammifère.
J'aurais voulu y apprendre la carte des feuilles,
on donne plutôt celle du rêve de l'escalier.
Une brise sur le carrefour,
un enfant la caresse du doigt et demande:

Pourquoi le vent?

 


 

Il faut d'abord vivre. Mais cette vie c'est quoi ? Il n'y a pas de chemin, j'en suis perdue. Là où je vais il manque une route, trop dense existence. Mais personne n'a touché cette forêt qui recelle bien des choses, où un lion féroce se tiendra debout, une coccinelle murmurant à son nez, et l'escabeau a disparu, j'étais bien embêtée.
J'ai parcouru ces bois en tout sens, arbre par arbre, puis feuille par feuille, puis fourmi par fourmi, j'y suis resté des heures. Je faisais pareil avec les humains, je scrutais les yeux, soulevais les lèvres supérieures, tâtais le poul et je mesurais l'écart entre leur tête et leur ongle du troisième doigt. Nous parlions, nous parlions, et j'ai toujours préféré les forêts où je pensais ma vie.

 


 

Mon image, j'y tiens peut-être.
Mais pas tant que ça
Pas tant qu'eux,
Pas tant.
Ceux qui l'accrochent en marge,
Ceux qui l'affichent
sur soixante mètres de long à l'entrée de la ville,
Ceux qui s'en drapent,
Ceux qui l'avalent et s'entêtent.
Avec cette image,
qu'ils recoivent et fabriquent,
j'ai joué autrefois.
Et je m'en défais en trouvant le point de moi-même.

 


 

Je tombe parfois dans des ténèbres absurdes où pas un mot n'est prononcé, ni pensé, ni rien.
C'est une petite boite souvent violée qui libère son flot opaque. Et quand je dis que j'y tombe, c'est mince: ça m'envahit, ça me possède, ça me tient là, immobile, les yeux révulsés et je joue au jeu des trois singes. Je ne sais ce que c'est, et ma raison n'y accède. Elle cicatrise parfois, je serais mieux sans mais elle est là, et je suis dedans. Alors je voudrais faire une boule de moi-même, entrer dedans, fermer la porte, et voguer dans ses affres insonsables.

Mais lorsque je tente de tourner la poignée, on m'interpelle à une réalité que je n'ai pas choisi, alors plutôt que de l'accepter je la fuis, je tourne le dos, et va m'enrouler ailleurs.

 

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